J’ai failli mettre ce billet dans Tata Jeanine la Coquine, mais figurez-vous que pour une fois, c’est presque sérieux.
Parce qu’imaginez-vous, ô vous mes fans printaniers et frestillants, qu’il n’y a pas longtemps, une de mes accointances (ah, il leur en arrive, des choses, à mes accointances, hein ? N’est-ce pas qu’on est tous hyper pas jaloux ? ) s’est retrouvée face à un modèle de garçon qu’on n’avait pas vu depuis très, très longtemps.
Le Relou.
Pas le Relou qui geint hein, non ; le Relou Vintage, qui essaye de te retourner le cervelet et de le bouffer en grillade.
Le Relou Vintage un peu comme quand tu as 16 ans et que genre il sait pas il doute il veut pas te faire du mal et c’est pour ça qu’il va à la soirée de Cassandra alors qu’il devait t’appeler, parce que tout est flou et qu’il pense que vous avez chacun besoin de réfléchir et d’y aller doucement.
Cette rencontre nous a plongées, mon accointance et moi, dans une sorte de réminiscence toute pourrie de ces longues soirées d’adolescences durant lesquelles, au lieu de partir danser comme si demain n’existait pas et boire des Perroquets comme si nos foies allaient vivre pour toujours, nous restions enfermées à décortiquer chaque virgule et à tenter de comprendre pourquoi, mais par la Grande Rillette, pourquoi, ces connards nous faisaient perdre notre temps (nous, on voulait bien leur tamponner les muqueuses une fois et partir sur notre chemin du Futur de l’Avenir de la Lumière hein, c’est eux qui faisaient une sorte de romantisme perplexisant alors qu’on n’avait rien demandé).
Or donc, après avoir passé deux heures à dégoiser, brainstormer, relire des sms, avec un sentiment de plus en plus prégnant et pouilleux de déjà -vu, soudain, l’évidence nous sauta au visage comme à un astronaute la sangsue Alien en goguette : « eeeeh mais attends ?! Ce serait pas un bon gros relou vintage ? »
Ah, quel soulagement mes amis !
Tels des Champollions victorieux, nous reprîmes une tournée de thé vert (oui, en ce moment je ne bois plus que du thé, j’ai eu un peu mal au ventre et je suis allée sur Doctissimo, le verdict a été sans appel : j’ai un cancer du foie. Du coup, je bois du thé vert. )
Et si toi aussi, fan vrombissant, tu en arrives à côtoyer, même brièvement, un Relou Vintage, je tiens, et je souligne, je tiens à te donner les signes. Pour que tu puisses : 1) ne surtout pas te laisser avoir par l’oreille moelleuse/ le petit sourire fripon/ l’œil pétillant que le Relou Vintage ne manquera pas d’afficher au début pour te ferrer ; 2) ne jamais, jamais acheter de Fiat Punto lui donner ton numéro et 3) partir en éclatant d’un rire cristallin pour bien lui montrer que tu l’as percé à jour et qu’il peut aller affrioler le yucca, à la place.
Bien.
- Le Relou Vintage est en général pluuuuuutôt pas mal. Il donne un peu faim. Parce qu’il ressemble aux mecs qui te faisaient fantasmer à 14 ans. Mais du coup, c’est presque pavlovien : tu te dis « Bonsoiiiiiiiir » dans ta tête alors que, franchement, pas de quoi casser trois pattes à un canard (d’autant qu’à 14 ans, tu portais aussi une banane et une coupe mulet, donc bon, le bon goût était une notion fluctuante).
- Le Relou Vintage est open. Il sourit. Il fait jouer ses oreilles moelleuse dans la lumière du soleil couchant, bref, il sait laisser une porte ouverte. Sans forcément être Relou-Palpateur. Du coup, tu as l’impression qu’il te drague avec le romantisme, sans insister, tu te dis soudain que pour ton mariage, tu aimerais bien louer un photomaton et faire ça en sous-bois avec plein de rubans verts et blancs et aussi… après tu secoues la tête très fort pour te souvenir que 1) tu ne veux pas te marier, 2) pour l’instant il t’a juste dit : « ah ouais ? », deux fois.
- Le Relou Vintage te laisse croire qu’il n’est pas contrariant.
Il veut bien discuter de macramé, parce que c’est ta passion, et que lui, la passion, il trouve ça bien. Il veut bien s’indigner des enfants qui meurent, parce que lui, les enfants qui meurent, il trouve ça pas bien.
A ce stade si tu étais dans ton état normal tu lui demanderais son avis sur les dauphins, les nazis et les enfants qui sont notre futur, mais tu ne le fais pas, et c’est pas trop bon signe. - Le Relou Vintage essaye de faire le mystère. Comme quand tu avais 14 ans toujours, hein, et que lui en avait 17, et donc presque 18, et donc était hyper vieux et donc t’impressionnait à mort.
Sauf que là en fait, tu n’as plus 14 ans.
Et maintenant, 12 ans d’écart ou pas 12 ans d’écart, tu t’en grattes un peu.
Désormais, tu sais bien qu’on peut être très con et très sans intérêt même si on a l’âge de conduire une mobylette.
Donc, pour esquiver ton système de défense anti-abrutis (pourtant testé, breveté, et en très bon étant de marche depuis 1997), le Relou Vintage parle avec des points de suspension.
Ce qui lui donne l’air profond, et réfléchi et mystérieux du mystère.
Ton système de défense part au tout-à-l’égout pendant que tu l’écoutes t’avouer avec une sincérité troublante que… tu sais… des fois… quand tu vois… comment le monde évolue… tu te dis… que le futur… que nous laissons… à nos enfants… l’effraye… un peu. (ENFANTS, il a dit ENFANTS ! Je file aux chiottes enlever mon stérilet et partons faire l’amour en points de suspension !). - Le Relou Vintage se débrouille pour avoir ton numéro, en donnant l’impression que c’est toi qui as insisté pour avoir le sien. Tu t’en vas en ayant l’impression d’avoir brisé le fin fil de confiance que ce moment à part dans un cadre enchanteur (=devant le Balto au milieu des gaz d’échappement et des odeurs de pisse) avait tissé entre vous avec ton insistance peu délicate. Tu te mets la rate au court bouillon.
- Du coup, tu fais l’erreur d’envoyer un sms.
- A partir de là, c’est le naufrage. Toutes ses réponses sont elliptiques et mystérieuses (= il ne sait pas quoi dire et il abuse des points de suspension).
Tu as l’impression qu’il est fin et cultivé (= quand tu dis quelque chose, ou fais référence à quelque chose qu’il ne connaît pas/ ne comprend pas, il répond une connerie du genre : « comme tu es surprenante…!!!???… », ce qui te fait frissonner de l’échine).
Son seul talent, en fait, c’est de ne jamais écrire « LOL ». (Pauvre de nous, ça suffit désormais à nous donner envie de faire un don d’ovule). Mais c’est déjà trop tard : tu le trouves elliptique et mystérieux et aussi mystérieux de l’elliptisme. - A un moment, tu appelles et tu demandes à le voir, car tu es d’humeur romantique et tu sens que cette relation naissante ne peut se contenter de la nourriture de l’âme (= tu as le postérieur rouge comme un babouin. Tu veux fréquenter. Plus précisément, tu veux lui FRÉQUENTER la GUEULE jusqu’à ce qu’il crie PITIÉ. ).
- Il te fait une réponse mystérieuse et elliptique. Ne peux-tu pas garder ces doux baisers comme un présent du moment, ne rien brusquer, laisser l’envie faire son chemin (= tu te sens comme la pire des catins, tu as l’impression d’avoir frappé à sa porte la chatte en éventail et de l’avoir dérangé pensant qu’il récitait son rosaire). (= aussi, comme ça tu te la mets sur l’oreille et à la seconde où il te dira qu’il est prêt, ce jouvenceau timide de 42 ans, tu accourras la culotte dans la poche, à 23h54, de Saint-Quentin-en-Yveline, en trottinette s’il le faut).
- Un jour où tu l’as prévenu que tu serais injoignable de chez injoignable, il laisse un message elliptique et mystérieux : « hey… je… pensais à toi… c’est tout… ».
- Tu décides d’aller voir quelqu’un de bon conseil (moi), parce que tout ceci devient un petit peu compliqué, que tu ne sais plus comment tu t’appelles, et que la personne que tu es normalement s’est transformée en un toi de 14 ans qui n’aurait même pas le réflexe de se protéger à coup de « tous des connards ». Un toi de 14 ans tout frais. Le cul offert, le cœur à l’étalage, un peu comme une huître qui attendrait avec impatience de traverser l’autoroute un vendredi soir à 18h30 pour aller rejoindre le citron de l’autre côté.
- Moi, j’écoute le truc, les sms lus à voix haute, le contexte de tu comprends, sa vie est floue, il ne veut plus souffrir, laisser la chance au destin, le temps au temps, et puis c’est ma faute, on s’est loupé, il est venu sonner chez moi un mercredi soir à minuit passée, il voulait me parler, mais j’étais en province pour un enterrement, font chier ces parents qui meurent.
- Après, j’emprunte le portable deux minutes, je vois les sms constitués uniquement de « … », les fautes d’accord, la fuite camouflée, et surtout, j’écoute le message plein de mystère et de points de suspension, et je remarque que ce
jeunehomme conclut par « tcha-tchao ». - Accointance ne me croit pas. Les oreilles aveuglées par le Doute, elle n’avait rien entendu de tel.
Elle réécoute le message et là, l’horrible vérité lui saute au visage.
C’est juste un relou, un Relou Vintage, qui veut niquer en semaine (le week-end, il doit faire des trucs avec ses vrais amis, ou avec sa femme hein, pour ce qu’on en sait…), qui a trouvé un créneau hyper-efficace et qui a réussi à transformer Accointance (qui gère 15 personnes au quotidien et peut tuer un homme à mains nues) en Emilie Jolie dysfonctionnelle qui accepterait de faire l’impasse sur la capote s’il rajoutait encore deux ou trois points d’interrogation. - Après Accointance doit négocier âprement, parce que sur la liste qu’on a échangée quelques années auparavant, il y a justement « si un jour je tombe croque d’un mec qui dit « tcha-tchao », tu me tues » (en même temps, moi Accointance c’est ma copine, je veux pas la tuer).
- Après elle efface le numéro, et on fête ça en jetant le thé par-dessus notre épaule (Mazel-Tov) et en commandant de la bière.Galaxie, j’espère que ce long et fastidieux récit pourra t’aider à éviter le destin de l’huître autoroutière.
Les signes à retenir !
- A 47 ans. Se conduit comme s’il en avait 17.
- Aime beaucoup la ponctuation.
- Aime aussi beaucoup pas te répondre clairement quand tu demandes s’il a quelqu’un dans sa vie.
- Aime beaucoup te réduire ? l’état de paramécie abrutie avec le cul rouge, parce que tu es plutôt futée, plutôt jolie, plutôt indépendante.
- Parle Italien hors contexte (genre vous êtes ? Bourcy-en-Brie et vous attendez ? un feu rouge).
- Dit « tcha-tchao… », ou « poutous… » ou « ? partir de l? … » ou « ? plus… » ou « douce nuit… »Chère Accointance, je t’avais prévenue que j’allais en parler. C’est pour le Bien de l’Humanité. Gros poutous !
Je m’appelle pas Accointance mais ça sonne quand même drôlement juste. J’ai bien ri (un peu jaune oui, mais ri quand même), merci !
Nom de dieu, je reconnais tout-? une autre époque, heureusement. Pas très lointaine, malheureusement.
J’ai ri aux éclats tellement c’est parfait!
C’est décrit moartellement.
Bisous.
tellement tellement tellement vrai !!! (preum’s etc)
Diantre et Foutrailles, c’est tellement vrai !
Putain, MERCI pour "la chatte en éventail". Je vais me coucher maintenant, et j’ai des images de carpaccio derrière les yeux.
argh rien que de lire doctissimo j’ai mal partout je vais mourrir encoreeeee
Je l’imagine très bien le relou-vintage, avec ses tempes légèrement grisonnantes, son sourire d’homme qui a vécu … ce qui nous faisaient trop craquer ? 14 ans !
Ce que l’on croit être de la délicatesse, n’est autre que de la muflerie.
A plus, ma douce !….
(les …. sont intentionnels ….)
sapristi un diagnostic!
merci dr house! je me coucherai moins bête!
Aaaaaaah le mec qui veut pas te faire de mal mais peut-être et sinon alors et puis.
Sinon je regrette qu’on soye deux mois trop tard pour envoyer une carte de St-Valentin avec « je vais te FRÉQUENTER ta GUEULE jusqu’? ce que tu cries PITIÉ » dessus. (En même temps, j’suis pas très St-Valentin, et la St-Valérien c’est presque pareil.) (Mais du coup je comprends pourquoi vous vouliez mettre ça dans la catégorie Tata Jeanine.)(J’ai personne ? qui envoyer la carte, aussi.)
Et maintenant je m’en vais méditer pour savoir si la question ? « c’est quoi le problème avec ‘ciao-ciao’? Tout le monde dit comme ça d’où je suis » contient sa propre réponse ou pas.
Rhaaaa, les gars ? trous ! C’est terrible pour les filles intelligentes. Vu que ce sont elles qui les remplissent (les trous) avec des trucs qu’elles inventent, ils ont l’air très très formidables. Mais si tu te penches sur l’entre les trous, c’est pas mal creux aussi en fait. C’est un modèle qui peut même pas te servir de passoire ? nouilles.
Comment vous remercier, Ô Grande Impératrice Galactique?! Moi qui cherchais qui était cet "ami" exactement qui veut revenir dans ma vie , mais pas trop, parce que tu vois… depuis des années… même si je ne l’ai pas laissé (re)faire, maintenant je peux l’étiqueter sans complexe grâce ? vous! Merci!!!
T’es la femme la plus drôle du monde!!!…
T’es une secte, c’est pas possible.
Vache, il faut créer un registre public, on a l’air de tous avoir reconnu quelqu’un. Ou alors faut faire dresser un portrait robot pour que ce psychopathe cesse de sévir… (et oui, points de suspension…)
La vraie question maintenant, c’est que faire quand on s’est fait eue et qu’on est tombée follement amoureuse du Relou Vintage et qu’il nous fait tourner en bourrique depuis des mois ? coups de "Nan mais faut pas qu’on s’attache". (connard)
Votre prose est d’utilité publique Impératrice ! Faisons tourner pour éviter ce douloureux destin ? d’autres inconscientes.
J’ai fait une découverte. Le relou vintage existe aussi au féminin. Plus fourbe, parce que plus subtile, elle n’en est pas moins reloute, la reloute vintage. C’est un doux mélange de distance (genre ado rougissante) et de "viens bel homme, aimons nous sans restriction"
– la reloute : je te trouve joli, j’aimerai bien qu’on se rapproche
– le gentil homme : cool, t’es jolie aussi, on fait des bisous ?
– la reloute : mouais … bof, pas tout de suite …
– l’homme patient : ah bon ? mais quand ?
– la R : quand je serai prête …
– l’homme, incrédule : prête ? Tu veux une brosse ? dent ? mon rouge ? lèvre ? Tu sais maintenant j’ai largement dépassé l’âge des flirtes, ça fait 3 mois que j’attends, j’en ai marre je me casse.
– la reloute : ah bah non, va pour le bisou alors
– l’homme satisfait : cool. On fait des câlins nocturnes ?
– la reloute : tu sais … je suis frileuse en ce moment …
– l’homme un peu lassé : bon bah tant pis, je m’en vais, la vie m’attend.
– la R : ah bah non, reviens … je t’aime bien …
– l’homme aux anges : oh punaise, un début de commencement d’affirmation de sentiment … on va courir nus dans les champs ?
– la R : je t’aime beaucoup, mais rien n’est simple. Le bonheur est trop éphémère … et puis tout le monde ne sait pas s’en servir …
– l’homme, songeant sincèrement ? se tourner vers l’homosexualité : l’a pô compris, c’est quand qu’on courre nus dans les champs ?
N’ayant jamais connu de Relou vintage, je m’interroge avec stupeur et anxiété : serait-ce donc que je n’ai pas de vie sociale ?
<3 Tu es mon idole en mieux.
Merci Impératrice !
Moi aussi j’ai ri jaune, mais ça m’a fait du bien. Si vous mettez sur pied ce registre national, gargamelle, j’ai un nom ? soumettre !