La Vraie Vie d’Eve Angeli – 2 2

Bon Eve a un concert à Gromouille-les-Ourdasses. C’est Michel son managuère qui lui a trouvé, Michel prend bien soin de sa carrière.

Pour se détendre, Eve arrose les plantes. Séance champêtre d’Eve courant de ci de là tel un papillon dyslexique pour arroser un laurier, un frêne, un chien, bref plein de pauvres créatures vivantes qui ne lui ont rien demandé. Mais quand même, moi qui n’aime pas les bêtes, je dois avouer que ça m’émeut quand je vois Rox le chien jouer avec sa petite Eve, ça l’amuse tellement le jet d’eau, qu’elle est mignonne !
Et puis c’est bien joli tout ça, mais le concert a lieu dans une heure, Eve va s’habiller.

Bon. Il faut savoir que quand Eve s’habille elle ne recherche pas vraiment l’élégance. Ni, euh, la sobriété. Vraisemblablement pas le confort non plus. J’en étais à me demander, mais que peut-elle donc bien chercher en mettant des choses pareilles, quand elle va voir Michel (qui regarde dans le vide, Michel regarde souvent dans le vide, ça doit lui faire un miroir de l’âme ou un truc poétique dans le genre) : « Est-ce que c’est joli ? »
Coup de théâtre ! Eve s’habille pour plaire à Michel ! C’est donc ça ! Du coup on se dit que Michel va lui expliquer gentiment : « Pupuce, je t’aime très fort mais tu ressembles à Pocahontas qui se lancerait dans une carrière de prostipute », mais pas du tout ! Michel, après avoir pris quelque secondes pour enlever ses yeux du vide et faire la mise au point sur sa chérie qui trône devant lui, des bottes molles aux pieds, un chapeau de cowboy en feutre sur la tête, une jupette des 80′s que c’est une honte, et un petit haut avec genre Université de Tuscon écrit dessus « Oui oui c’est joli »
Ahah ! Voilà la preuve ! Si Eve Angeli s’habille comme une version sous acide de Fievel au Far West, c’est la faute de Michel.

Michel dit bon, on part dans 10 minutes. Du coup (syndicalement , elle est obligée, vu que c’est une fille il faut se conformer au cliché) Eve dit « Attends, attends, je dois me changer ! » Et se met à chercher frénétiquement une veste à franges qui, dit-elle, fait « indien ». L’opposition entre cowboy et indien n’a pas l’air de trop gêner Eve, disons qu’elle marquera la renaissance de l’Amérique unie et qu’elle sera une sorte de cowdienne, hein allez, on dit comme ça. Bref, elle cherche partout, nicht veste.

Michel, assis sur les marches de l’escalier, lance de temps à autre un vague « t’as regardé dans le placard ? » pendant que Eve dit « t’es gentil de m’aider comme ça, chouchou »
Mais toujours pas de veste à frangette.
On a donc droit à des images de l’intérieur des placards de Eve Angeli, ben dites donc, pour quelqu’un qui est supposé servir de modèle aux filles de 8 à 11 ans, elle range pas très très bien ses affaires.
Finalement elle retrouve une sorte de chandail long qui se boutonne, un truc beigeasse tout moche, mais bon à ce stade, elle est vêtue d’un haut de maillot de bain triangle, d’un short bleu marine, des bottes blanc sale et d’un mini mini boléro gris argenté, alors si vous voulez, le fait que son chandail soit moche, du coup ça n’a plus vraiment d’importance. Michel, dans un geste de cruauté inouïe, ose lui tapoter la croupe en disant « mais oui t’es belle ». L’immonde salaud.

Soudain, l’oreille de Michel se dresse. Il se met aux arrêts. Sa babine tremble, sa queue frétille, que se passe-t-il ?
« Ecoute le bruit de l’eau ! dit-il à Eve dans une sorte d’exhalaison de philosophie vandamienne.
- Hein ? demande Eve
- Dis donc, quand t’as arrosé les plantes, t’as éteint le jet ? »
Eve dirait bien oui mais on sent dans son regard qu’elle n’a pas compris la question.

Michel part donc dans le jardin, où il trouve le jet glougloutant dans un parterre.
Deux minutes pleines à regarder le jet ouvert en disant « Ah c’est sûr, le laurier là, il a pas soif. Hein, là, y va pas mourir de la canicule. Ça oui, c’est sûr, là avec le jet ouvert comme ça, ça coule », Michel prend l’initiative de sauver l’Amazonie en éteignant enfin ce satané jet.

Eve ajuste ses seins, et en avant pour l’aventure…

(à suivre)